L'olivier de Kavousi en Crète

Dans la mythologie grecque, Anios, le roi de l’île de Délos (île sacrée dans l’antiquité grecque), le petit-fils de Dionysos et Ariane, et sa femme Dorippi eurent trois filles : Oino, Spermo et Elais. Oino avait la possibilité de tout transformer en vin (« οίνος » en grec), Spermo (dont le nom est dérivé du verbe « semer ») pouvait tout transformer en céréales (blé, orge, seigle, etc.) et Elais (dont le nom vient de « ελαία », l’olivier et l’olive), avait la capacité de transformer tout en l’huile d’olive.

Comme nous le montre le mythe, ces trois filles, qu’on surnommait « oenotropae », représentent les trois principaux produits des terres grecques de l’ Antiquité à nos jours : le vin, dont le dieu protecteur est Dionysos, l’huile d’olive sous la protection de la déesse Athena et les céréales, protégées par la déesse Demeter.
Dans un précédent article, nous avons traité du vin en Crète ; aujourd’hui nous parlerons de l’huile d’olive et de l’olivier en Crète.

L’olivier, avec une présence dans la région méditerranéenne qui se perd dans la nuit des temps, est une espèce indigène de Crète, comme en témoignent les oliviers sauvages « Olea Europaea var. Silvestris », que l’on trouve principalement sur la côte sud de l’île, mais aussi les oliviers « Olea Europaea var. Europaea », vieux de centaines voire de milliers d’années, dispersés dans toute l’île.

Les oliviers classés au patrimoine

17 oliviers ont été nommés « monumentaux » et déclarés « monuments historiques et ­culturels » appartenant au patrimoine par l’association des municipalités oléicoles de Crète : l’olivier du village de Kavousi (préfecture de Lassithi), l’olivier du village de Panassos (préfecture d’Héraklion), l’olivier de Gortyna (à Agii Deka dans la préfecture d’ Héraklion), l’olivier « Paliama » dans le village Moroni (préfecture d’Héraklion), l’olivier de Kamilari (préfecture d’Héraklion), l’olivier « gros » dans le village d’Ano Viannos (préfecture d’ Héraklion), l’olivier du village d’Ageliana (préfecture de Rethymno), l’olivier « Gre Elie » à Kato Tripodo (préfecture de Rethymno), l’olivier « Genna » à Syvritos (préfecture de Rethymno), l’olivier de Samonas (préfecture de Chania), l’olivier de Vouves (préfecture de Chania), l’olivier de Palia Roumata (préfecture de Chania), l’olivier de Saint Georges du village de Kandanos (préfecture de Chania), l’olivier « Grampela » à Annissaraki (préfecture de Chania), l’olivier « Ypsomeni » à Vatolakkos (préfecture de Chania), l’olivier « Megali Elia » à Aerinos (préfecture de Chania) et l’oliveraie « Mnimiako Alsos Elias Asomaton » à Amari (préfecture de Rethymno).

L’olivier de Kavousi

Le premier olivier, celui du village de Kavousi, à 2 km au sud du village, se trouve à côté du site (récemment fouillé) d’« Azorias ». Il est considéré comme l’olivier vivant le plus ancien de Crète, et comme l’un des arbres les plus anciens du monde entier. Ses mesures officielles : à sa base, le périmètre du tronc est de 22,10 m et son diamètre de 7,10 m ; à une hauteur de 80 cm, le périmètre est de 14,20 m et le diamètre de 4,90 m ; quant au feuillage, son périmètre est de 34,50 m et son diamètre de 10,90 m.

Un arbre vraiment impressionnant de la variété « mastoïde » (ou « moratolia » dans le dialecte local) qui s’est greffé sur un sujet sauvage, ce qui explique son énorme résistance au temps. Il produit encore de nombreuses olives et son âge est estimé à 3 250 ans par les experts qui pensent qu’il aurait été planté à la période minoenne post-palatiale, soit environ 1 250 avant J-C ou plus tôt encore.

Il convient également de noter qu’une branche de cet arbre a couronné la vainqueure du marathon féminin aux Jeux Olympiques d‘Athènes en 2004.
C’est surtout un grand honneur pour nous Crétois qui aujourd’hui encore profitons de l’ombre et de l’huile d’olive de cet olivier, des bénéfices qu’ont appréciés les 110 générations précédentes et, en premier lieu, les Minoens qui ont planté et greffé cet arbre à quelques centaines de mètres des sites d’Azorias et de Kastro et à 4 km du port minoen de Tholos.

Il est intéressant enfin de se rappeler qu’il y a 3 250 ans cet olivier était appelé « e-ra-wa/e-lai-a » par ceux qui le cultivaient et l’huile d’olive « e-ra-wo/e-lai-on » dans l’écriture syllabique du linéaire b tel qu’en témoignent des tablettes d’argile imprimé.

Par Thanasis Karagiannis, membre crétois de l’association Alsace-Crète